samedi 29 décembre 2007

Les mots


Si pour bâtir on lance l'appel aux pierres, pour écrire on s'adresse aux mots.

Précisément depuis quelques jours, lisant un auteur excellent, je me retrouve devant un amas de lettres disparates. Tous les mots gisent là, face à moi.

Je les contemple, les retourne en tous sens. Rien n'en sort, rien du moins qui ait un tant soit peu d'important.

Dans un moment pareil, on se rend compte combien, les mots sont puissants, terrifiants, des bombes à retardements, des parterres de fleurs, des reliquats de notre mémoire, des rêves en suspension dans l'air ambiant et au bout de notre propre horizon.

Si puissants qu'ils changent l'horizon de chaque terrien et pourtant nous foulons la même planète. Notre regard diffère, dans la distance que nous prenons, dans la fermeture de nos yeux qui deviennent parfois de véritables meurtrières. Nos filtres égoïstes déguisent l'horizon du monde à notre mesure et envie.

Que faire alors de tous ces beaux sujets, véritables provocateurs pour moi qui les aime. Plus fougueux que des chevaux, plus rapide que l'éclair, je tente en vain de les happer. Ils caracolent tout le long de mes jardins en papier.

Jadis, jamais ils n'auraient pris la main. Ma main les aurait domptés.

Ce soir, la force manque à mon fleuret. La lame ploie, la victime est exangue. La plume n'est plus qu'au sommet du chapeau et sèche doucement.

Les mots fuient les maux. Le sang versé au Pakistan s'impose aux rêveries. Le remou des guerres immobilise mon encrier. A proximité, la tête de l'An nouveau pointe, couleur pourpre sur fond blanc. Comment offrir les voeux face à tant de folie?

D'ailleurs, les voeux ne sont jamais qu'un merveilleux assemblage de mes amis les mots. Ils sont sincères mais sur quoi érigeront-ils leurs fondations? Sur le déséquilibre d'un monde qui se perd d'avoir trop joué?

Répondez-moi que l'espoir est la seule chose qui ne meurt pas et je vous rétorquerai d'aller le chanter comme la cigale aux enfants affamés, aux femmes battues, aux hommes enchaînés dans des prisons inconnues.

Comme disait James, les quatre horizons crucifient le monde et nous qu'y ferons-nous?

Personnellement, je ne possède rien pour empêcher la rage humaine.

Voltaire recommandait de maintenir le peuple dans l'ignorance. Les puissants sont restés ses fidèles élèves. Et comme autrefois les croisés, on part au sacrifice extrême, fuyant ainsi l'horreur quotidienne. Mort violente et rapide plutôt que l'agonie lente et insoutenable.....


Voyez-vous combien l'amas de mes mots est devenu désordonné?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très beau blog, j'aime bien la façon dont tu écris et les illustrations! :-) A bientôt! Chris

Arwen Gernak a dit…

Je te remercie humblement.
Désormais tu es de l'autre côté de la frontière: celle des illustres.
Bonne chance et une grande réussite. Surtout ne cesse pas d'écrire